Carla Bozulich : « Boy » Constellation 2014
Un vieil air de rock’n roll, un piano désaccordé, une scène enfumée, tel est le décor d’entrée du nouvel opus de Carla Bozulich (Evangelista, Geraldine Fibbers). Des posters de Tom Waits et des Bad Seeds tapissent l’édifice tandis que de vagues sillons gothiques résonnent dans l’arrière salle. Une marimba cassée accompagne des airs de samba frelatée. L’ensemble est délabré mais nulle envie de le quitter. Le chant maniéré ou épuré hante peu à peu des compositions étranglées. Le disque suffoque et la moiteur est insupportable. Et pourtant cet enregistrement fascine, de plus en plus, à chaque écoute. Des guitares se crispent pour soulager une rythmique crépusculaire. Certains titres sont des merveilles de comptines rock’n roll qui n’auraient pas dépareillées sur le catalogue Sun mais qui sont au final restées trop longtemps dans l’ombre. Déformées par l’oubli et le temps, elles apparaissent sous un jour nouveau. Ce jour de rouille, quand Roy Orbison découvrit sa Pretty Woman avachie et acariâtre. « Boy » opère comme un miroir déformant de la musique des fifties. Le dernier « Drug Store » en quelque sorte, accueillant néanmoins les visages cendrés de la No Wave. De temps en temps, les fenêtres s’ouvrent et la piste de danse se remplit mais tout le monde regagne très vite la pénombre. Carla Bozulich vient de donner vie à un disque trépassé, vénéneux et fascinant de bout en bout. Très probablement le le disque le plus passionnant de Constellation depuis la sortie en 1999 du « Slow Riot For New Zero Kanada » des Godspeed You ! Black Emperor.
DL
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