Extra Life : Dream Seeds « African Tape/ Northern Spy 2012
Javais découvert avec un peu de retard au détour d’un barbecue dans un jardin nantais, le deuxième album (« Made In Flesh ») de ce groupe de Brooklyn. J’étais tès vite tombé sous le charme d’une musique qui me renvoyait à mes découvertes adolescentes en matière de New Wave et pourtant, je n’avais pas l’impression d’écouter une pâle évocation de mes souvenirs brumeux. Ce renvoi à des moments précis de ma vie passée m’avaient même fait perdre le fil momentanément des discussions avec mes hôtes.
J’avais par la suite acquis leurs précédentes productions, relayant leurs sorties récentes mais sans véritablement décrire mon enthousiasme (pour une fois!!) envers Extra Life. Un lien très personnel s’était déjà établi entre leur musique et mon quotidien. Déjà échaudé par certaines remarques déplaisantes de mes confrères musicaux, j’écoutais très régulièrement leurs différents disques, seul au casque, en attendant de rencontrer des personnes à même de partager mes sentiments naissants.
J’ai ensuite eu la chance de les voir sur scène lors du dernier festival Africantape. Alors que mes compagnons de voyage préféraient le bar et les évocations des histoires cocasses d’organisateurs de concerts et de fanzineux, je me suis peu à peu rapprocher de la scène, malgré une certain lassitude . Après trois jours de concerts, j’aspirais à autre chose à ce moment de la soirée. Et pourtant, bien qu’un expert en soirées lyonnaise me susurrait qu’Extra Life, c’était mieux avant (que de fois n’ais-je entendu et malheureusement prononcé moi aussi cette funeste sentence), le groupe m’a touché, ému, me renvoyant une nouvelle fois à une autre période de ma vie. Une époque plus solitaire, ballotée par les embruns et les écoutés répétées au walkman de formations anglaises comme les Monochrome Set, XTC, Chameleons. Et sur le dernier morceau du concert, un titre qui figure d’ailleurs sur ce nouvel album, l’énormissime « Blinded Beast » , j’ai ressenti les raisons de cette nostalgie soudaine. Extra Life , au-delà de ses influences possède une musicalité qui me touche de la même manière qu’au début des années 90. Leur fragilité, leur précisiosité, leur élégance me bouleversent totalement le temps de ces quatorze minutes de très très grande intensité. Imaginez une seule seconde And Also the Trees reprenant un titre de Neurosis, et vous aurez une vague idée du torrent d’émotions qui est passé au Ground Zero à cet instant. Je déteste à quelques exception près les morceaux de plus de dix minutes mais cette complainte infernale et son entêtant refrain « Running Backwards » ont fait voler en éclat toutes mes préemptions.
J’aimais beaucoup leurs précédents enregistrements mais ce nouvel album les propulse dans une autre catégorie : celle des formations référencées qui deviennent par leur seul talent les références de demain. Extra Life comme Xiu Xiu rêve les yeux grands ouverts sur une Angleterre fantasmée lors d’écoutes répétées des Wolfhounds, Felt, Mc Carthy. Le chant haut perché de Charlie Looker, si proche de celui de Dave Callahan des Moonshake, risque d’agacer comme ceux de Morrissey ou de Lawrence en leur temps. La musique est sombre, mélancolique, grandiloquente mais leur conviction et une production tout en nuance les éloigne de toute forme de complaisance. Tandis qu’à l’heure actuelle , The XX occupe la lumière, à l’image des Cure au temps de « Pornography », Extra Life a tout pour incarner leur face sombre, leur aspect Banshees. Ce disque est tout simplement bouleversant et devrait fédérer un cortège de fans hardcore dans les semaines et mois à venir. Car comme le clame un enfant au début de « Dream Seeds » : No Dreams Tonight!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
D L
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